Le GR20 en 3 jours

Jour 3: Verde - Conca

Dimanche 4 septembre 2011

L’orage a éclaté cette nuit là. A minuit la pluie tombait encore en abondance. Une vigilance orange avait été posée sur la corse pour cette journée du 4 août. L’étape est incertaine mais à 2h50 je me lève en essayant de ne pas réveiller les randonneurs. Finalement la pluie s’est arrêtée pour laisser la place à un brouillard dû à l’humidité. Le vent est également de la partie ! Après une petite hésitation, je décide quand même de partir et de monter dans un premier temps à Prati « pour voir ». Si les conditions sont trop mauvaises en haut, pas question de continuer.

J’avale 2-3 biscuits et m’élance à 3h05. Le repas de la veille était copieux : côtes de porc au grill + frites et crudités en entrée. Fromage et melon en dessert. Du coup, je n’ai pas encore la grosse fringale. Mieux vaut monter l’estomac pas trop lourd. Je mangerai au refuge.

Le t-shirt Falke en laine+polyester prêt du corps suffit pour la montée dans la foret même si des goûtes tombent par intermittence. La dernière partie de la montée est à découvert et quelques passages pluvieux me font hésiter à enfiler mon gore-tex. Je monte à un bon rythme et le brouillard a disparu.
 
L’arrivée au col m’oblige à enfiler la veste Le vent est assez fort et plus d’arbres pour se protéger de la pluie. Arrivée à Prati à 4h15, pas un bruit tout le monde dort. La pluie est forte par moment et j’hésite à repartir. Mais il ne fait pas froid et quelques moments d’accalmie me laissent penser que le temps se maintiendra. Je repars en direction d’Usciolu motivé. Le moral reste bon, les jambes vont bien et la pluie semble se calmer. Je vois les lumières dans la vallée à l’est comme à l’ouest, c’est bon signe. Je m’éclate sur cette étape très ludique où de nombreux passages de gros blocs m’obligent à utiliser les mains. Mes mitaines rembourrées aux paumes me sont d’une grande utilité !
 
L’aube commence à se lever, le paysage est fantastique, la pluie a cessé depuis un moment. Je croise les premiers randonneurs de la journée à la descente sur le refuge d’Usciolu. Arrivée à 7h30, c’est le moment de casser la croûte. Bi-choco, barre de céréale et le reste de cake. Les gens sont dans leurs préparatifs, la fatigue se lie sur certains visages. Le mien surement aussi, je ne dois pas être beau à voir ! Pas la peine de remplir la platipus, la source suivante est à 1h environ, après la crête. Je ferai la pause déjeuner à la passerelle suspendue, avant la montée sur l’Incudine.
 
Je passe par l’ancien tracé qu’ils ont débalisés en repassant de la peinture grise sur les traces rouges et blanches. Ceux qui ne connaissent pas se font avoir et rallongent par les bergeries (nouveau tracé) et cela ajoute 3h à l’étape qui est déjà longue si on pousse jusqu'à Asinao. De plus on perd toute la vue de la crête et de l’Incudine.
 
Une fois la crete passée, je peu reprendre le rythme et courir jusqu’à la passerelle car c’est une partie très roulante. Arrêt déjeuner vers 10h30 au bord de la rivière, je suis vraiment seul sur cette étape. Sardines, pain et un reste de fromage, barre de céréales et biscuits. Il me reste du malto que je n’ai pas encore utilisé. Je vais remplir ma platipus avec à la source de l’Incudine.
 
Le sommet est dans les nuages mais je profite de quelques rayons de soleil dans la montée. Il fait chaud et je m’arrête un moment à la source pour bien m’hydrater. Je suis bien la crête qui est cairnée car j’arrive vers le sommet et j’ai perdu la visibilité à cause des nuages. Quelques gouttes de pluie réapparaissent mais le plus dur est passé et si le temps se gâte cet après-midi, je serai relativement protégé par la suite.
Le sommet : la vue est bouchée, je ne traîne pas ici car le temps n’est pas terrible.
 
La redescente sur Asinao est technique, il faut bien resté concentré. Je bavarde avec des randonneurs, surpris de savoir que je suis parti de Verde ce matin. Arrivée à 12h au refuge d’Asinao. Après 9h de rando course. Il faut à nouveau recharger les batteries. J’achète des biscuits salés, un orangina et des gâteaux. Je reste un peu au chaud dans le refuge car la pluie ne s’est pas calmée. Je mange avec 2 jeunes qui font le GR du sud au nord et qui ont décidé de ne pas continuer la journée à cause du mauvais temps. La variante alpine de Balla est trop exposée aujourd’hui, il y a du vent, il pleut fort, tout est dans les nuages. Je risque de galérer donc je prends finalement la décision de faire le tour par le tracé normal.
 
Je me souvenais qu’elle était longue cette étape et ça s’est confirmé. Je commence à avoir une douleur sur le dessus du pied gauche qui m’inquiète. J’ai beau m’étirer elle ne part pas. La descente d’Asinao a été traumatisante et je suis peut-être allé trop vite. Ou est-ce l’accumulation ? La douleur commence à s’installer et je décide de marcher. Le contournement des aiguilles est très long quand on a mal au pied.
 
J’arrive finalement à Bavella à 15h10 et je pense faire une bonne pause bien mérité. J’ai faim et il me reste une grosse étape. Du coup je m’installe à une table de l’auberge et commande une omelette frite avec une bonne bière. 16h, il faut repartir. J’ai fait le plus dur mais la fin peut réserver des surprises. Je me lève de ma chaise et là je sens bien que mon pied ne va pas bien du tout. En refroidissant, la douleur s’est amplifiée. Je boîte c’est galère ! Je me dis que j’aurai moins mal d’ici 15min. Mais rien n’y fait. J’avance péniblement et chaque marche en descente est une souffrance.
 
J’arrive à Paliri à 17h, je recharge en en eau et je continue. Je n’ai pas le choix, ma voiture est à Conca et si je m’arrête maintenant, je ne pourrai plus repartir. Je trouve 2 bâtons pour m’aider à avancer et me soulager le pied. Ça fonctionne plutôt bien. Il fait beau, les couleurs de fin de journée offrent un spectacle de toute beauté sur les falaises environnantes. A part le pied qui m’inquiète un peu, je garde le moral et le physique est bon.
 
Je me fixe de petits objectifs car j’ai bien cette dernière étape en tête : le petit col, la source, la rivière avec ses piscines naturelles, la remontée et la longue traversée finale avant d’atteindre « la porte », enfin ! Que c’est long cette fin d’étape. La nuit commence à tomber. Il est 20h et je suis obligé de rallumer ma frontale pour la descente finale à Conca. Mais peu importe l’heure, je suis arrivé au bout et fier de ce que j’ai accompli.20h30, la délivrance après une journée de 17h30 !
 
C’est bon la voiture est toujours là. Il est tard, je reste finalement manger et dormir à l’auberge. Une bonne douche, des vêtements propres et un bon repas chaud.
 
C’est étrange de se retrouver là après 3 jours aussi intenses. Je me sens comme hors du temps et mon esprit est encore dans les montagnes. Le corps à besoin de repos après cette épreuve et mon pied, très enflé le soir à mon arrivée, a finalement désenflé le lendemain matin grâce à la poche de glace que m’a donnée l’aubergiste et à la bonne nuit de sommeil.
 
C’est à l’auberge que je sympathise avec Jean-Pierre, un jurassien passionné de montagne et qui a malheureusement écourté son périple à cause d’une douleur au genou.
Les 2 jours qu’il me reste en corse seront les bienvenus pour la récupération : sieste et plage, un bon programme !